À l’heure où le sommeil se pose comme un véritable enjeu de santé publique, la question de la sieste et de ses bienfaits refait progressivement surface. En effet, si pendant des siècles, dormir quelques minutes ou quelques heures au cours de la journée était tout à fait intégré dans les rythmes de société, il semblerait que cette habitude ait été délaissée, notamment en France. Pourtant, cette pratique se révèle plus que bénéfique pour notre organisme… Le docteur Tourrasse, médecin généraliste et spécialisé dans les soins naturels, nous explique pourquoi !
La sieste : définition
Le mot sieste vient de l’espagnol « siesta », qui vient lui-même du nom latin « sexta », qui signifie la sixième heure du jour. Elle correspond à un temps de repos, plus ou moins long, au cours de la journée. On parle aussi parfois de méridienne ou de semi-creux circadien. Et pour cause ! En suivant le rythme circadien, c’est-à-dire notre horloge biologique interne, l’être humain peut ressentir une baisse de vigilance et des pics somnolences en début d’après-midi entre 13h et 15h.
Si la digestion et l’alimentation, joue aussi un rôle sur la sensation de fatigue qui peut intervenir au milieu de journée, la sieste correspond à un véritable besoin physiologique, celui de la récupération. Ce temps de repos permet de répondre au rythme chronobiologique chez l’adulte et de mieux gérer l’équilibre quotidien entre le temps de veille et le temps de repos.
Aujourd’hui, on constate que ce petit bout de temps que l’on s’accordait avec bonheur et simplicité jusqu’au milieu du XXème siècle, a perdu de son éclat face aux exigences de la productivité.
Dans certains pays chauds, elle reste toujours une habitude en raison des fortes chaleurs qui ne permettent pas d’avoir une activité et une productivité optimale lorsque que le soleil est à son zénith. En Asie, comme au Japon et en Chine par exemple, faire la sieste, même au travail, est parfaitement intégré dans les mœurs.
En Europe et aux États-Unis, la sieste commence petit à petit à reprendre ses lettres de noblesse et être considérée comme un véritable atout en matière de santé. En effet, face à la recrudescence de personnes sujettes à des troubles du sommeil et à la réduction du nombre d’heure de sommeil par nuit (nous avons perdu 1,5 heure de sommeil par nuit et par personne en moyenne en seulement 50 ans) , dormir quelques minutes au cours de la journée et ce même au travail devient de plus en plus plébiscité.
Le saviez vous ?
Suite à une récente découverte de l’historien américain Roger Ekirch, auteur de La grande transformation du sommeil, il semblerait que nous dormions en deux fois jusqu’à la Révolution industrielle, en Occident. En effet, la plupart des gens avaient un sommeil biphasique, c’est à dire qu’ils se couchaient dès la tombée de la nuit, puis se réveillaient au cours de la nuit une heure en moyenne avant de se rendormir jusqu’au lever du jour.
Courte ou longue : quelle est la durée idéale pour une sieste ?
Selon ses besoins, le temps dont on dispose ou tout simplement le ressenti à un moment T, on distingue plusieurs types de siestes selon leurs durées et leurs effets sur l’organisme.
La micro sieste ou sieste flash : une petite sieste de 5 à 10 minutes
La sieste éclair, « power nap » ou encore sieste flash, est une courte pause de sommeil qui dure généralement entre 10 et 20 minutes. Elle est idéale pour recharger rapidement les batteries sans entrer dans une phase de sommeil profond, ce qui permet de se réveiller en se sentant rafraîchi et alerte. Et vous remarquerez que, quand vous vous assoupissez ne serait-ce qu’une minute ou deux (par exemple en voiture), vous plongez instantanément dans les rêves, et vous ressortez de ce mini sommeil un petit peu plus en forme. Pas très longtemps, mais suffisamment pour vous en rendre compte.
Si vous dormez une vingtaine de minutes, la bonne forme durera bien plus longtemps !
La sieste de 30 minutes
La sieste de 30 minutes est un peu plus longue et permet de récupérer davantage, mais elle peut entraîner une légère inertie du sommeil, une sensation de grogginess, car on commence à entrer dans les phases plus profondes du sommeil sans toutefois les compléter.
La sieste longue
La sieste de 60 minutes permet d’atteindre les phases profondes du sommeil, ce qui peut être bénéfique pour la mémoire et l’apprentissage. Toutefois, elle peut également entraîner une sensation de lourdeur au réveil en raison de l’interruption du cycle de sommeil profond.
Dès lors qu’on dépasse une heure, soit 1h30, cela correspond à un cycle de sommeil complet, incluant le sommeil paradoxal. Cette sieste permet de passer par toutes les phases du sommeil, y compris la phase des rêves. Elle peut ainsi améliorer la créativité et les fonctions cognitives sans provoquer d’inertie du sommeil.
Enfin, il y a la sieste prophylactique, qui est planifiée en prévision d’une période où le sommeil sera réduit, comme avant un long voyage ou une nuit de travail. Cette sieste peut aider à prévenir la somnolence future et à maintenir un niveau de performance élevée. Elle est particulièrement adaptée aux travailleurs de nuit.
Est-il bon de faire une sieste de 2h ?
Une sieste de deux heures n’est pas recommandée ! Pourquoi ? Parce qu’elle peut avoir des effets contre-productifs, surtout si elle n’est pas adaptée à vos besoins spécifiques de sommeil.
De fait, si vous dormez trop longtemps pendant la journée, cela risque de perturber votre cycle de sommeil naturel. De plus, se réveiller après une sieste prolongée peut souvent entraîner une sensation de désorientation, phénomène aussi connu sous le nom d’inertie du sommeil, rendant le retour à des activités normales difficile.
Combien de temps pour une sieste réparatrice ?
Une sieste réparatrice dure généralement entre 10 et 30 minutes. Cette durée est idéale pour améliorer la vigilance et la performance sans entrer dans les phases profondes du sommeil. Pour maximiser les bienfaits d’une sieste, il est également conseillé de la faire en début d’après-midi, ce qui coïncide avec une baisse naturelle de l’énergie pour beaucoup de personnes.
Mise en garde
Au volant, il est recommandé de faire une pause, et donc éventuellement une petite sieste, toutes les deux heures. Dès lors que vous ressentez les premiers signes de fatigue comme la sensation de paupières lourdes ou des bâillements répétés par exemple, arrêtez vous pour faire une pause récupératrice. La sieste est désormais reconnue pour lutter contre les risques d’accident de la route.
Faire la sieste : quels sont les bienfaits ?
De nombreuses études ont mis à jour les effets bénéfiques que peut avoir la sieste sur notre santé globale. Elle est aussi très bénéfique en période de changement hormonale, comme la ménopause par exemple, ou chez la femme enceinte, car les bouleversements hormonaux peuvent engendrer des perturbations du sommeil (sueurs nocturnes, insomnies, etc.).
La sieste efficace pour diminuer le stress
Faire une sieste durant la journée permet de réduire la sensation de stress, notamment au travail, et favoriser la relaxation de façon générale. Elle favorise la bonne humeur durant la journée grâce à une sensation de détente renforcée. Elle permet au corps de se détendre, de réduire les niveaux de cortisol (l’hormone du stress) et d’augmenter ceux de sérotonine, ce qui peut aider à mieux gérer les tensions quotidiennes.
La sieste favorise la concentration et la vigilance
En premier lieu, elle améliore la vigilance et la concentration. Une courte sieste de 10 à 20 minutes peut réduire la somnolence et augmenter l’attention, ce qui est particulièrement bénéfique en milieu de journée lorsque la fatigue commence à se faire sentir.
La sieste augmente les performances cognitives
Sur le plan cognitif, la sieste peut renforcer la mémoire et les capacités d’apprentissage. Des études montrent qu’une sieste, en particulier celles d’une durée de 60 à 90 minutes, permet de consolider les informations apprises plus tôt dans la journée, en facilitant le processus de transfert de ces informations vers la mémoire à long terme.
La sieste, processus de régénération
La sieste a opéré un processus de régénération, salvateur.
La première chose que l’on ressent, c’est une certaine fluidité dans le corps et dans l’esprit, une plus grande acuité pour comprendre et percevoir, une plus grande pertinence dans l’analyse d’une situation. Il semble donc plus intéressant, en termes de rendement, de préférer une sieste courte de 20 à 30 minutes, à une sieste d’une heure et demie au bout de laquelle on va émerger avec difficulté.
L’observation montre d’ailleurs que, dans la majorité des cas, une sieste longue ne favorise pas le sommeil nocturne et peut même le perturber. Néanmoins, une sieste courte va l’améliorer. Mais cela est affaire de cas particulier. Une personne plus âgée, qui fonctionne sur un rythme plus lent qu’un jeune de 20 ans, aura naturellement tendance à avoir besoin d’une sieste plus longue.
Quels conseils naturels pour une sieste optimale ?
On peut utiliser des aides, pour ceux qui ont du mal à lâcher prise pour faire la sieste, telles que : écouter une musique douce, une séance de relaxation ou des exercices de sophrologie, le bruit des vagues, le chant des oiseaux… ou bien encore une conférence ou un podcast sur n’importe quel sujet qui vous intéresse !
D’ailleurs, le fait de se trouver les yeux fermés, immobile, uniquement focalisé sur la voix du conférencier, peut induire un état de somnolence au bout de quelques minutes. Cela peut être, chez certaines personnes, une bonne manière de faciliter le sommeil.
Il est également préférable de s’isoler dans un endroit calme et sombre ou le moins éclairé possible, sans forcément être totalement dans la pénombre, car l’objectif est de se reposer et de fermer ses yeux. L’important est d’être coupé d’une source de lumière bleue et de choisir un endroit confortable pour s’installer. Libre à chacun de s’allonger dans un fauteuil, un hamac, un lit ou encore un canapé.
Si vous êtes en extérieur, opter pour une sieste à l’ombre, car une exposition trop longue au soleil présente de nombreux dangers, surtout si l’on s’endort !
Puisque chacun est différent, il faut essayer différentes mises en place et techniques, et adopter la méthode qui marche !
Sachez aussi qu’il existe des solutions naturelles pour faciliter l’endormissement et un sommeil de qualité comme certaines tisanes ou certaines huiles essentielles à diffuser.
L’importance du sommeil, draineur de chimie cérébrale
Tous les animaux dorment. Et étonnamment, pourtant, le sommeil est un laps de temps dans la vie pendant lequel on est des plus vulnérables. Il apparaît donc comme une évidence que dormir ne peut pas se contenter d’être un passe-temps, ou un bien-être, mais une fonction essentielle à la vie.
Une simple logique de déduction nous amène à l’hypothèse que le corps, se recyclant en permanence – à l’instar des émonctoires qui drainent, vers la sortie, les toxines résultant de la chimie du corps : reins, foie, peau, poumons, intestin-, il existe aussi les toxines créées par la chimie cérébrale, et au bout d’un moment, il faut bien les évacuer elles-aussi…
Cette observation simple a fini par être expliquée, en partie, il y a quelques années, quand on a découvert que le cerveau draine ses toxines quand il dort.
Toute activité chimique génère des résidus, à fortiori quand il s’agit d’une activité aussi complexe. Il est très probable que nous découvrirons aussi, dans les années à venir, que le cerveau recycle les toxines de l’activité mentale consciente, lors du sommeil.
On s’est également rendu compte que l’activité cérébrale consciente génère un neuromédiateur (appelé adénosine) dont l’action progressive, en s’accumulant dans l’organisme, ralentit le rythme cérébral et favorise l’endormissement.
Ainsi, plus je reste éveillé, plus je m’imprègne de chimie qui fait dormir… Mais ce neurotransmetteur et ces toxines ne sont probablement qu’une toute petite pièce des mécanismes complexes dans lesquels plonge le corps quand nous dormons.
Les différents cycles / phases du sommeil
Le sommeil comporte plusieurs phases, sous forme de cycles d’environ une heure et demie. C’est la phase de sommeil paradoxal qui correspond à la production des rêves. Elle dure une vingtaine de minutes. Bien que toutes les phases de sommeil aient leur importance, il semble que le sommeil paradoxal soit la phase la plus importante sur le plan de la récupération.
Plus en détail, les cycles de sommeil se déroulent en plusieurs phases successives, chacune ayant des caractéristiques spécifiques. D’abord, on entre dans la phase de sommeil léger, où l’on commence à s’endormir. Durant cette étape, l’activité cérébrale ralentit, les muscles se détendent, et le corps est en transition entre l’éveil et le sommeil.
Cette phase est suivie par le sommeil profond, où le corps se régénère, les tissus se réparent, et le système immunitaire se renforce. C’est une période cruciale pour la récupération physique. Ensuite, vient le sommeil paradoxal, également appelé REM (Rapid Eye Movement). Pendant cette phase, l’activité cérébrale est intense, similaire à celle de l’éveil, et c’est le moment où la majorité des rêves surviennent.
Ce cycle complet dure environ 90 minutes et se répète plusieurs fois au cours de la nuit, avec des phases de sommeil paradoxal devenant plus longues à chaque cycle successif.
Le bon équilibre entre ces différentes phases est essentiel pour une nuit de sommeil réparatrice et pour le bien-être général.
Manque de sommeil : quelles conséquences sur l’organisme ?
Quand vous venez de lire une page sans l’avoir comprise, ou que vous vous laissez flotter en voyant défiler le paysage dans le train, vous êtes en train d’expérimenter le mode hypnose, dans lequel notre cerveau, tout au long de la journée, plonge de manière régulière, qu’on le perçoive ou pas. C’est un état physiologique, normal, indispensable à son bon fonctionnement.
Très souvent, cela se produit quand on est devant notre ordinateur, on bugge quelques instants, puis on reprend. C’est normal, notre cerveau ne peut pas travailler en production ou en apprentissage de manière continue pendant des heures.
Le manque de sommeil a des conséquences, non seulement sur l’humeur et sur nos facultés cognitives, c’est-à-dire nos facultés intellectuelles, mais également sur la santé. C’est pourquoi, la sieste revêt une importance capitale sur tous ces points : santé, humeur, facultés intellectuelles, et donc performance au travail.